Lettre d’infos – Octobre 2023

Obligations convertibles et SARL

Source : Documentation juridique
Les obligations sont des titres négociables qui, dans une même émission, confèrent un droit de créance pour une même valeur nominale, ce sont donc des valeurs mobilières. Une SARL peut émettre des obligations si elle a désigné un commissaire aux comptes et si ses comptes des trois derniers exercices de 12 mois ont été régulièrement approuvés par les associés. Ces titres sont soumis au régime applicable aux obligations émises par les sociétés par actions à l’exception de certaines règles.
Les sociétés par actions peuvent émettre des obligations convertibles en actions permettant à leur titulaire d’opter à terme entre un remboursement de sa créance en espèces et un remboursement en actions. Ces obligations « composées » sont soumises à un régime autonome de celui des obligations simples. Aucune disposition ne prévoit cette possibilité pour les SARL et l’émission de toute valeur mobilière autre que celle citée ci-dessus (obligation si commissaire aux comptes et si trois exercices approuvés) est interdite sous peine de sanctions pénales à l’encontre des gérants.
Les SARL peuvent-elles émettre des obligations convertibles en parts sociales ?
Oui, répond l’Association nationale des sociétés par actions (Ansa), pour qui les associés d’une SARL peuvent autoriser une telle émission.
Et comment s’opère la conversion des obligations ?
La libération des parts sociales s’effectue, précise l’Ansa, par compensation entre la créance de l’obligataire sur la société et sa dette d’apport dans les conditions de l’article 1347 du Code civil. L’absence de dispositions dans le Code de commerce prévoyant expressément la possibilité de libérer des parts sociales par compensation de créance ne doit pas être interprétée comme l’interdisant. L’Ansa recommande cependant que les statuts prévoient ce mode de libération des parts sociales.
La Compagnie nationale des commissaires aux comptes s’était déjà prononcée en faveur de la possibilité pour une SARL d’émettre des obligations convertibles en parts sociales.
L’Ansa apporte surtout des précisions sur la réalisation de l’augmentation de capital consécutive à la conversion des obligations en parts sociales en indiquant que la libération des parts a lieu par compensation entre la créance représentée par le titre obligataire et la créance de la société au titre de l’apport résultant de la conversion des parts.
Pour rappel, la compensation de créance est l’extinction simultanée d’obligations réciproques entre deux personnes. Cette compensation ne peut avoir lieu qu’entre créances fongibles, certaines, liquides et exigibles). La jurisprudence a depuis longtemps admis la modalité de libération par compensation à propos d’augmentation de capital classique. Certaines décisions imposent néanmoins que le paiement par compensation soit expressément prévu par les statuts tandis que d’autres autorisent ce mode de libération des actions à moins que les statuts ou les associés ne l’aient expressément écarté.
Au-delà de la libération des parts, la réalisation de l’augmentation de capital se heurte à des difficultés pratiques, notamment en raison de l’impossibilité pour les SARL de se prévaloir du régime de formalités simplifiées applicable aux valeurs mobilières donnant accès au capital émises par les sociétés par actions.

La caution doit-elle régler si elle est appelée après la date limite de son engagement

Source : Chambre commerciale de la Cour de Cassation 1er juin 2023
Une banque consent à une société un prêt d’une durée de 84 mois garanti par un cautionnement d’une durée de 108 mois. Après la mise en liquidation judiciaire de la société, la banque poursuit la caution en paiement, laquelle lui oppose l’extinction de son obligation de règlement.
Une cour d’appel déclare l’action de la banque irrecevable car forclose en se fondant sur l’argumentation suivante : lorsque le cautionnement garantit une dette déterminée, l’obligation de couverture et l’obligation de règlement sont confondues pour avoir dès l’origine une même étendue, définie par référence à la dette garantie, et pour s’éteindre en même temps. La fixation d’une durée au cautionnement excédant le terme de l’obligation principale ne peut s’interpréter que comme exprimant la commune intention des parties de stipuler un délai limitant dans le temps le droit de poursuite du créancier.
La Cour de cassation censure cette décision. En l’absence de stipulation expresse contractuelle limitant dans le temps le droit de poursuite du créancier, le fait que la caution soit appelée à payer après la date limite de son engagement est sans incidence sur l’obligation de la caution portant sur la créance née avant cette date. La cour d’appel ne pouvait pas valablement refuser de condamner la caution à exécuter son engagement sans relever dans le contrat de cautionnement l’existence d’une stipulation expresse restreignant dans le temps le droit de poursuite de la banque.
Les commentateurs pensent que cette décision conserve sa valeur même si elle a été rendue sous le régime précédent la réforme du droit des sûretés (septembre 2021).
La jurisprudence distingue l’obligation de couverture et l’obligation de règlement de la caution. Cette distinction a été consacrée par la réforme : la fin du cautionnement (arrivée du terme ou résiliation) éteint l’obligation de couverture (les dettes nées après ne sont pas couvertes) mais elle laisse survivre l’obligation de règlement (les dettes nées avant restent couvertes).
Mais n’oublions pas que le Code civil permet de prévoir une disposition contraire, dès lors qu’elle est rédigée (limitation par rapport à la date de naissance de l’engagement ou par rapport à celle du droit de poursuite dans le temps du créancier).

Réforme du régime des fusions, scissions et apports partiels d’actif

Source : Ordonnance du 24 mai 2023, applicable aux opérations internes et transfrontalières dont le projet a été déposé au greffe du tribunal de commerce depuis le 1er juillet 2023.

◘ Architecture des nouvelles règles

Chaque opération fait désormais l’objet d’une section particulière, les sections consacrées à la fusion et à la scission étant divisées en deux sous-sections, la première comportant les règles applicables à toutes les sociétés commerciales et la seconde, les règles spécifiques aux opérations comportant la participation de sociétés par actions ou de SARL. La plupart des articles du chapitre sont en conséquence renumérotés.
Bien que la nouvelle structure limite le recours aux renvois, certaines règles du régime des scissions et des apports partiels d’actifs soumis au régime des scissions demeurent fixées par renvoi au régime des fusions.

S’agissant plus particulièrement des scissions, l’article L 236-20 modifié, qui détermine le domaine d’application du régime spécifique aux scissions comportant la participation de sociétés par actions ou de SARL vise, d’une part, les scissions entre sociétés par actions et, d’autre part, les scissions comportant la participation de sociétés par actions et de SARL. 

A la lettre du texte, les scissions réalisées uniquement entre SARL ne sont plus soumises à ce régime spécifique.

Les dispositions relatives aux fusions séparent également les fusions entre sociétés par actions, entre SARL ou entre sociétés par actions et SARL. Il en est de même pour les opérations d’apports partiels d’actif. 

Concernant les apports partiels d’actifs, on sait qu’il est possible d’opter pour le régime des scissions, ce qui consiste à les soumettre aux dispositions relatives aux scissions, à l’exclusion de sa sous-section 2. Mais la nouvelle rédaction du texte n’est applicable qu’aux opérations réalisées entre sociétés par actions ou comportant à la fois la participation de sociétés par actions et de SARL. Même soumis au régime des scissions, les apports partiels d’actifs concernant uniquement des SARL ne sont dès lors pas régis par les articles L 236-20 à L 236-26.

Et donc pour des scissions ou apports partiels d’actif entre SARL, il n’y a pas de rapport des dirigeants, pas d’intervention d’un commissaire à la scission ou aux apports, et donc absence de protection des créanciers obligataires de la société scindée ou apporteuse par absence de dispense d’accomplissement des formalités requises, en cas de transfert de fonds de commerce.

Un article prévoit cependant publicité spéciale en cas d’apport d’un fonds et une procédure de déclaration des créances au greffe du tribunal de commerce du lieu de situation du fonds, conditionnée par l’accomplissement de cette publicité spéciale. Ces publications peuvent aboutir soit à la nullité de la transmission du fonds, soit à la solidarité de l’apporteur et du bénéficiaire de l’apport du fonds à l’égard des créanciers de l’apporteur.

En cas de scission n’impliquant que des SARL, les sociétés bénéficiaires de la scission ne sont plus solidairement responsables du passif de la société scindée à l’égard des créanciers de celle-ci : en cas d’apport partiel d’actifs, les créanciers de société apporteuse bénéficient désormais de la solidarité des sociétés bénéficiaires en vertu d’un texte spécifique, applicable à toutes les sociétés commerciales.

En outre, les scissions n’impliquant que des SARL ne bénéficient plus du régime simplifié dit des scissions à 100 % mais d’un régime simplifié en vertu d’un texte spécial, applicable aux opérations impliquant des sociétés par actions et/ou des SARL.

◘ Dispense d’échange de parts ou d’actions

Une fusion, une scission ou un apport partiel d’actifs donne en principe lieu à un échange de parts ou d’actions de la société absorbante ou bénéficiaire des apports contre des parts ou des actions de la société absorbée, scindée ou apporteuse.

Aux cas déjà prévus de dispense d’échange de droits sociaux (lorsque les parts ou actions des sociétés qui disparaissent sont détenues par la société bénéficiaire, par la société qui disparaît ou encore par une société détenant la totalité du capital de ces sociétés), l’ordonnance ajoute un nouveau cas de dispense d’échange : lorsque les parts ou actions des sociétés qui disparaissent sont détenues par les associés des sociétés qui fusionnent dans les mêmes proportions dans toutes ces sociétés et que ces proportions sont conservées à l’issue de l’opération.

◘ Délégations de compétence ou de pouvoir

Ainsi, en cas de délégation au conseil d’administration ou au directoire dans la SA de la compétence pour décider une fusion ou le pouvoir d’en fixer les modalités, par les actionnaires, c’est désormais un mois avant la date de l’assemblée de la ou des sociétés absorbées que le dépôt au greffe du projet de fusion et la publicité de l’avis de fusion doivent intervenir et que le rapport du commissaire à la fusion doit être mis à la disposition des associés.

◘ Suppression des délégations en cas de scission ou d’apport partiel d’actifs

L’ordonnance supprime, en cas de scission ou d’apport partiel d’actifs soumis au régime des scissions, la faculté de délégation de compétence ou de pouvoir. Il semblerait que ce soit une erreur à corriger par une ordonnance.

◘ Projet de fusion, de scission ou d’apport partiel d’actifs

Depuis le 1er juillet 2023, les projets de fusion, de scission ou d’apport partiel d’actifs soumis au régime des scissions déposés au greffe sont annexés au registre du commerce et des sociétés et au registre national des entreprises pour les mettre à la disposition du public.

Comme auparavant, le projet de fusion, de scission ou d’apport partiel d’actifs soumis au régime des scissions fait l’objet d’un avis inséré au Bodacc et, le cas échéant, au BALO. Mais contrairement à auparavant, seule la publication du projet est requise sur le site internet sans publication de l’avis au Bodacc et, le cas échéant, au BALO si le projet est publié sur le site @ de la société pendant auquel il est fait référence n’est à publier que si le site internet n’est plus accessible pendant une période ininterrompue de 30 jours au plus tard avant la date fixée pour l’assemblée appelée à se prononcer sur le projet.

Jusqu’à présent, chaque société participant à l’opération devait disposer de son propre site internet, même si l’opération était réalisée entre sociétés d’un même groupe. Cette disposition n’a pas été modifiée.

◘ Contenu du projet d’apport partiel d’actifs

Le contenu du projet d’apport partiel d’actifs soumis au régime des scissions est différent de celui des projets de fusion ou de scission car n’ont pas à figurer :

·         les modalités de remise des parts ou actions et la date à partir de laquelle ces parts ou actions donnent droit aux bénéfices, ainsi que toute modalité particulière relative à ce droit ;

·         le rapport d’échange des droits sociaux et, le cas échéant, le montant de la soulte ;

·         les droits accordés aux associés ayant des droits spéciaux et aux porteurs de titres autres que des actions ainsi que, le cas échéant, tous avantages particuliers.

◘ Scission partielle

L’ordonnance consacre dans le Code de commerce la possibilité d’attribuer des parts et des actions représentant la contrepartie des apports, directement aux associés de la société apporteuse, lorsque les sociétés participantes décident de soumettre l’opération au régime des scissions. Les parts ou actions attribuées aux associés peuvent être celles de la ou des sociétés bénéficiaires, ceux de la société apporteuse ou les deux à la fois.

Sur le plan juridique, il était nécessaire de procéder, dans un premier temps, à une attribution des parts ou actions de la société bénéficiaire à la société apporteuse puis, dans un second temps, à une distribution de ces parts ou actions aux associés de la société apporteuse.

Si une attribution directe de parts ou d’actions aux associés de la société apporteuse est envisagée, le projet d’apport partiel d’actifs devra comporter les indications supplémentaires suivantes :

·         la répartition envisagée, au bénéfice des associés de la société apporteuse, des parts ou des actions des sociétés apporteuse ou bénéficiaires attribuées en contrepartie de l’apport ainsi que les critères sur lesquels cette répartition est fondée ;

·         si l’attribution est réalisée par réduction du capital ou par imputation sur les capitaux propres de la société apporteuse en précisant, dans ce dernier cas, les modalités comptables de l’opération.

◘ Absorption d’une filiale à 90 %

Un régime dit semi-simplifié, applicable en cas d’absorption d’une filiale à 90 %, permet de se dispenser de l’approbation de la fusion par l’assemblée de la société absorbante (sauf demande des actionnaires ou des associés minoritaires) ainsi que de l’établissement des rapports des commissaires à la fusion et des dirigeants à condition qu’une offre de rachat ait été présentée aux minoritaires.

Ce régime était jusqu’à présent seulement applicable aux fusions réalisées entre sociétés par actions lorsque 90 % au moins des droits de vote de la société absorbée étaient détenus par la société absorbante ou que 90 % au moins des droits de vote de ces deux sociétés étaient détenus par une même société mère qui n’en détenait pas la totalité (C. com. art. L 236-11-1, al. 1 ancien).

Il est désormais étendu aux sociétés dont le capital est constitué par des parts sociales.

Par ailleurs, l’appréciation du seuil de détention de 90 % est modifiée : le seuil n’est plus apprécié en droits de vote mais en parts ou titres conférant des droits de vote. Il en résulte que les droits de vote double ou vote multiple attachés aux actions ne sont plus pris en considération, seuls l’étant les actions auxquelles ils se rattachent.


 

 

Sont aussi exclues les actions privées de droit de vote de façon permanente, telles les actions de préférence sans droit de vote. La prise en compte des parts ou des titres dont les droits de vote ont été temporairement suspendus (actions auto-détenues) demeure plus incertaine.

L’ordonnance précise, enfin, que le régime des fusions semi-simplifiées entre sociétés sœurs détenues à au moins 90 % par une même société mère qui n’en détient pas la totalité s’applique. Le régime semi-simplifié est donc applicable aux opérations entre plusieurs sociétés sœurs détenues à 90 % pour les unes et à 100 % pour les autres par une même société mère.

◘ Déclaration de conformité

Les SA et les sociétés européennes (SE) participant à une fusion ou à une scission doivent déposer au greffe, à peine de nullité, une déclaration de conformité qui relate tous les actes effectués en vue de procéder à l’opération et affirme que la fusion ou la scission a été réalisée en conformité avec les lois et règlements.

Retenons que cette obligation est maintenue même si la rédaction des texte en changeant donne une fausse impression de suppression de cette obligation pour les sociétés européennes.

◘ Règles applicables seulement aux scissions

○ Scission simplifiée

Le bénéfice du régime simplifié lorsque la totalité des parts ou actions de la société scindée est détenue par la société bénéficiaire ou lorsqu’une même société détient la totalité des parts ou actions de la société scindée et de la société bénéficiaire est rétabli pour les scissions n’impliquant que des sociétés par actions.

Les observateurs ont cependant noté que, par inadvertance, les opérations n’impliquant que des SARL se trouvent désormais exclues du régime simplifié.

○ Protection des créanciers de la société scindée

Le principe de responsabilité solidaire des sociétés bénéficiaires d’une scission à l’égard des obligataires et des créanciers non obligataires de la société scindée est maintenu sauf en cas de scission n’impliquant que des SARL Toutefois, l’ordonnance limite le montant maximal dû par les sociétés bénéficiaires au titre de la responsabilité solidaire à la valeur, à la date à laquelle la scission prend effet, des actifs nets qui leur sont attribués. Ainsi si l’actif net issu d’une scission est négatif, il n’y a pas de responsabilité solidaire des sociétés même si certaines bénéficient d’un actif net positif.

◘ Règles applicables seulement aux apports partiels d’actifs

○ Définition des apports partiels d’actifs

L’apport partiel d’actifs est désormais défini comme l’opération par laquelle une société apporte une partie de son actif et, le cas échéant, une partie de son passif à une ou plusieurs sociétés existantes ou nouvelles, ces sociétés pouvant d’un commun accord décider de soumettre l’opération au régime des scissions.

Cette définition consacre expressément la possibilité d’apporter une partie de l’actif à plusieurs sociétés bénéficiaires au cours de la même opération. Cela permet notamment de ne déposer qu’un seul projet d’apport au greffe et donc de bénéficier d’un point de départ unique pour les délais d’opposition des créanciers des différentes sociétés participantes.

L’effet de transmission universelle de patrimoine en cas d’opération d’apport partiel d’actifs est désormais consacré dans le Code de commerce. Le régime des scissions et l’effet de transmission universelle du patrimoine qui lui est lié peuvent concerner un apport partiel d’actif isolé.

○Apport partiel d’actifs simplifié

Un apport partiel d’actifs réalisé entre sociétés par actions dont l’une est filiale à 100 % de l’autre bénéficie d’un régime simplifié (pas d’approbation de l’opération par les assemblées des sociétés participantes sauf demande des associés minoritaires et pas d’établissement des rapports des dirigeants et des commissaires à la scission ou aux apports.


 

 

Le bénéfice du régime simplifié est étendu aux apports partiels d’actifs réalisés entre SARL ou entre sociétés par actions et SARL.

○ Droits des créanciers de la société apporteuse

En cas d’apport partiel d’actifs soumis au régime des scissions, les droits des créanciers de la société apporteuse étaient jusqu’à présent assurés par renvoi vers le régime des scissions, qui prévoyait un principe de responsabilité solidaire des sociétés bénéficiaires ainsi que la possibilité d’y déroger. L’ordonnance introduit dans la section relative aux apports partiels d’actifs deux articles qui reprennent les dispositions relatives à la protection des créanciers en cas de scission, en les adaptant aux spécificités de l’apport partiel d’actifs, quelle que soit la forme des sociétés commerciales participant à l’opération.

Selon le premier article, la ou les sociétés bénéficiaires des apports et la société apporteuse sont débitrices solidaires des créanciers non obligataires de l’apporteuse, en lieu et place de celle-ci, sans que cette substitution emporte novation à leur égard.
Les bénéficiaires deviennent débitrices des créanciers de l’apporteuse en lieu et place de celle-ci sans que la substitution emporte novation à l’égard des créanciers, la société apporteuse restant toutefois solidairement tenue envers ceux-ci. C’est ce que pensait la Cour de cassation.

Comme pour les scissions (vu plus haut), le montant maximal de la responsabilité solidaire des sociétés concernées par l’apport partiel d’actifs est limité à la valeur des actifs nets qui leur sont attribués, évalués à la date de prise d’effet de l’opération. Les sociétés concernées par cette limitation ne peuvent être que les sociétés bénéficiaires des apports à qui sont attribués des éléments d’actif au sens du texte et non la société apporteuse, qui reste tenue, à notre avis, pour l’ensemble de la dette.

Selon le second article il y a dérogation au principe de responsabilité solidaire si les sociétés bénéficiaires de l’apport ne sont tenues que de la partie du passif de la société qui apporte une partie de son actif mise à leur charge respective et sans solidarité entre elles. En présence d’une telle stipulation, les créanciers non obligataires des sociétés participantes peuvent former opposition à l’opération dans les mêmes conditions qu’en cas de scission.

On notera que, comme pour les scissions, le droit d’opposition est ouvert non seulement aux créanciers non obligataires de la société apporteuse mais aussi à ceux de la société bénéficiaire de l’apport, alors que la mise à l’écart de la responsabilité solidaire ne préjudicie pas au droit de gage de ces derniers, la stipulation leur permettant, au contraire, de ne pas être en concurrence avec les créanciers de la société apporteuse.

Contrôle fiscal des exercices prescrits : quand et jusqu’à quand ?

Source : 5 juillet 2023 Conseil d’État

Le Livre des Procédures Fiscales (article 169) permet le droit de reprise de l’administration en impôt sur les sociétés et en impôt sur le revenu jusqu’à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due. Toutefois, la période susceptible d’être vérifiée par l’administration ne coïncide pas nécessairement avec la période non prescrite. En effet, d’une manière générale, la jurisprudence reconnaît à l’administration le droit de contrôler et de remettre en cause, le cas échéant, des déficits nés au cours d’exercices prescrits dès lors qu’ils ont été imputés par l’entreprise sur les résultats d’un exercice non prescrit. Le droit au report en avant des déficits subis par les sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés étant illimité, le droit reconnu à l’administration de contrôler la réalité des déficits peut remonter sans limitation dans le temps.

Le Conseil d’État complète sa jurisprudence en jugeant que l’administration est fondée à exercer son pouvoir de contrôle et de rectification d’un déficit issu d’exercices antérieurs prescrits, dont l’entreprise déclare disposer à la clôture d’un exercice, alors même que ce déficit n’a pas été imputé sur les bénéfices de cet exercice, et est donc seulement susceptible d’affecter le résultat d’exercices ultérieurs par la voie du report déficitaire.

Écrit autrement un déficit de 1990 non imputé en 2023 (si tenté que sur un strict plan économique la société ait pu supporter cette situation sans déposer le bilan) ouvre un droit à la vérification des opérations de 1990.

Dans l’affaire jugée, l’administration a rectifié le stock de déficits dont disposait la société à l’ouverture du premier exercice non prescrit (2009) en faisant porter son contrôle sur le résultat déclaré au titre d’années antérieures (2003 à 2008).

Or la société, structurellement déficitaire sur toute cette période, soutenait que l’administration n’était pas fondée à vérifier l’existence et le montant des déficits déclarés au titre de ces exercices prescrits, alors que ces déficits, certes reportables sur des exercices postérieurs, n’avaient pas été imputés sur les résultats des trois exercices non prescrits sur lesquels la vérification de comptabilité avait porté.

Les juges du fond ont estimé que l’administration était fondée à contrôler les déficits d’exercices prescrits non imputés sur des exercices contrôlés non prescrits tout simplement parce que les déficits non prescrits pouvaient influer sur le résultat d’exercices non prescrits.

Le Conseil d’État confirme cette position autorisant l’administration à contrôler des déficits d’exercices prescrits, y compris dans le cas où aucune conséquence immédiate ni concrète n’en a été tirée sur des exercices non prescrits.

Que doit comprendre la cession d’une activité en cas de départ en retraite

Source : Cour Administrative d’Appel de Nantes 31 mars 2023

Ne peut être regardée comme ayant cédé une entreprise individuelle a un contribuable qui cède le fonds de commerce d’un camping sans céder le terrain sur lequel ce dernier est installé ni les bâtiments et équipements nécessaires à son exploitation, tels que les chalets, les gîtes, les blocs sanitaires, la piscine, une grange et une maison de fonction, donnés en location, pour une durée de neuf ans, au nouvel exploitant. En effet, ce fonds ne peut pas être exploité de façon autonome sans ces biens immobiliers conservés par le contribuable.

Dès lors que ce dernier a maintenu le terrain et les bâtiments nécessaires à l’exploitation du camping dans son patrimoine professionnel, il ne peut pas se prévaloir de la doctrine administrative autorisant le cédant à conserver la propriété des immeubles nécessaires à l’exploitation si le cessionnaire s’en voit garantir l’usage de manière pérenne. Cette doctrine, qui précise en outre que, dans ce cas, l’opération aboutit à un retrait de l’actif professionnel des éléments conservés par le cédant, fait en effet obstacle à ce que les immeubles en cause restent dans l’actif professionnel du cédant, alors même qu’il s’agirait d’un patrimoine professionnel distinct.

Le contribuable ne peut, par ailleurs, pas se prévaloir de la doctrine administrative en vertu de laquelle le cédant peut, sans remise en cause du régime d’exonération prévu à l’article 151 septies A du CGI, exercer une activité professionnelle dans une autre entreprise (BOI-BIC-PVMV-40-20-20-30 n° 50 : BIC-XIX-31155), dans la mesure où la condition de cession d’une entreprise individuelle n’a pas été respectée et où, en tout état de cause, le contribuable n’a pas exercé une activité professionnelle dans une autre entreprise mais dans un démembrement de son entreprise initiale.

Et dans cette affaire il importe peu, pour la cour, que les biens immobiliers conservés par le cédant soient donnés en location au nouvel exploitant du camping.

À SIGNALER :

Maîtrise des loyers commerciaux

Source : Loi du 7 juillet 2023

Jusqu’au 1er trimestre 2024, et pour la deuxième année consécutive, l’évolution annuelle de l’indice des loyers commerciaux est limitée à 3,5 % au profit des locataires petites et moyennes entreprises.

PME = moins de 250 personnes et chiffre d’affaires annuel inférieur à 50.000.000€ ou total du bilan annuel inférieur à 43.000.000€.

 
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